mercredi 23 juillet 2008

Le Billet de François Leguil : ces tristes lubies…

|LNA n°9|
“Il faut toujours craindre l’influence qu’exercent des subalternes qui se glissent dans les administrations : un grand homme d’État se doit bien garder de ces talents médiocres qui prennent les irritations de leur amour propre pour les besoins de la société, leurs prétentions pour des principes, et leur envie pour de la politique” écrivait Chateaubriand, dans le Moniteur, en avril 1818. Bien avant hier, comme on voit… Aujourd’hui, pensera l’innocent, c’est “du pareil au même” !
Eh bien non. C’est pire. Il ne s’agit pas de seulement vitupérer le lampiste éternel, jocrisse assez insuffisant si l’on veut expliquer pourquoi le plus grand danger revient : celui que nous pensions atermoyé par le charme de ces délais “à la française”, qui savent plonger dans un oubli pudique les incongruités d’une législation très imparfaite.
Les limites de la décence sont passées avec le texte de cet arrêté qui, sous couvert de “formation” et de “titre”, met à nu le rôle de ses véritables inspirateurs. Hargneuse et longue, l’hostilité contre la psychanalyse est aussi connue que la psychanalyse elle-même, et le dessein de ses ennemis demeure constant : écraser la découverte du transfert par Freud ; nier qu’en faire l’expérience permet d’accompagner, avec les idéaux intouchés de la raison, ceux qui souffrent, au mental comme au moral ; négliger que la transformation de soi qui s’y trouve requise est aussi bien une ascèse ; ne rien vouloir retenir des lenteurs fertiles d’un apprentissage du tact et de la prudence ; brimer finalement les chances de cet apprentissage qui n’est rien de moins que celui des libertés vraies.
Il n’est pas réjouissant de lire un texte qui, s’il aboutissait, foulerait à court terme et sans vergogne ces libertés secrètes. Mais cela ne se ferait pas sans les rebellions opiniâtres, qui sont autant de notre coutume que n’en font partie, hélas, ces tristes lubies administratives.